
Lundi 10 Mars 2008-13h23
Dans son budhabar à elle, univers embrumé, bruyant et calme à la fois. L’odeur de cigarette, la musique espagnole suivait le rythme saccadé de sa respiration et la fumée suivait le mouvement de ses yeux, la trajectoire de son regard distrait et rêveur. Comme à son habitude, son thé au jasmin à la main, et ses affaires éparpillés un peu partout sur la table : écharpe, lunettes, stylos, calepin, porte feuille, sac à main etc…Seule comme à son habitude entre 13h et 14h de chaque lundi. Dans un rythme de 100 à l’heure, son 13/14 était son échappatoire et le moment pendant lequel elle oubliait tout le monde et pendant lequel elle ne voulait être dérangée sous aucun prétexte.
Lundi 10 Mars 2008- 13h13
Dévoré et tiraillé par la vie qu’il mène. Attiré par cette femme jolie à croquer mais sans plus d’intérêt pour elle. Elle est toute douce, toute mimi, toute gentille, toute…mais tellement sans intérêt pour lui. Il la désire par moments, la veut pour lui à d’autres…et parfois il en veut une autre. Celle qui le déstabilise, qui le mobilise, l’immobilise. Celle qui le cherche, qui le pousse, le repousse et celle qui lui fait découvrir tout un monde nouveau. Lui qui a tout vu, tout vécu, qui plus rien ne choque, n’ébranle. Lui n’ayant jamais été amoureux mais qui pourtant en a connu des femmes, cherche juste un regard.
Lundi 10 Mars 2008- 14h13
« Entre dos aguas » de Paco di Lucia remplissait l’espace et parfumait les faïences murales d’un air d’été, de jardins andalous et de placettes creusées…Il se faufila entre les habitués de l’endroit. Tout le monde se parlait en musique, par les regards, par les sourires, sans trop de mots…que le son de la guitare, que les mots des cordes entre eux. Il s’assit à la seule table libre, se commanda une sangria et respira un bon coup.
« Ne pas oublier d’appeler Sonia » C’est ce qui était écrit en post-it sur un calepin qui était posé là sur la table.
Il se tourna vers la porte mais ne vit personne partir. Il se leva le calepin à la main, se dirigea vers le comptoir…puis fit demi tour, se rassit et ouvrit le fameux agenda.
Lundi 10 Mars 2008-20h46
« Ma vie vient de s’effacer en un coup de crayon… bon, pas toute ma vie, mais les six prochains mois. J’ai perdu ‘Angelo’, mon amour, mon garde secret, mon garde fou. C’est bête d’écrire ça sur un bout de papier volant et non pas sur les pages parfumées d’Angelo. Je suis triste. Full stop »
Mardi 11 Mars 2008-13h08
Il la cherchait du regard. Il avait déjà vu sa photo traitée sur photoshop se baladant dans le fameux calepin. Jeune femme, la vingtaine et quelques poussières, cheveux longs, noirs, sourire franc et malicieux, yeux bleus gris (ou peut être d’une autre couleur) mais le regard provocateur. Elle n’était pas encore arrivée. Pourtant dans son quotidien, tous les jours, elle écrivait quelques mots entre 13h et 14h en notant bien la date, l’heure et le lieu : « los ojos del ángel »
Il y était. Elle y était aussi. Il arriva enfin à la distinguer parmi toutes les jeunes femmes belles et séduisantes présentes. Elle était toute seule attablée, tapait du bout des doigts sur le rythme de la musique du bar. De temps en temps, elle parlait à l’un des serveurs en chuchotant puis éclatait de rire à haute voix.
Il pensa aller lui parler et lui donner son agenda. Mais il n’osa pas. Cette jeune femme avait tellement de présence, tellement de charisme et de caractère qui se dégageait de son sourire et par-dessous la multitude de couleurs qu’elle portait. Non, elle ne lui faisait pas peur…mais elle le tenait assis là, à l’observer pendant toute une heure sans oser lui parler.
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