mercredi 28 octobre 2009

when the sun goes down part 3


Dans la foule

-J’espère que tu ne m’as pas trop attendue. C’est ma mère, elle est de passage à Paris, elle a une conférence après demain à Londres. Je devais rester avec elle un peu.

-Salue là de ma part si tu la revois. Alors comment vas-tu ? Attends, je vais nous prendre à boire avant et on sortira discuter un peu avant d’attaquer la piste. Tu veux quoi ?

-Non laisse, c’est moi qui y vais. J’ai une conso gratuite, lui dit Meriem avec son air le plus malicieux. Toi, tu prends quoi ?

-Un shot de Tequila

Au salon du « king Size »

Les vibes de Claude Monnet parvenaient à peine aux oreilles de Meriem et –M-

-Aaaaah Claude Monnet, j’adore ses mix…Ces petites touches jazz et soul…mmm quel délice. Meriem avait mis sa tête sur les genoux de –M- comme elle aimait le faire et balançait la tête au rythme de la musique en bas. Attends, t’as écouté le ‘King Size’ volume 5 ? Il est magnifique. Il y a de tout, enfin tout ce que tu adores.

-C’est à moi que tu demandes ça ? T’as oublié que ce club était presque mien ?

-Ah oui merde, j’ai oublié ton lien très fort avec Caroline-la blonde jolie et sexy, fille du proprio certes mais peste à temps perdu. Elle est encore accro à ton corps d’athlète ? Demanda Meriem, tout en passant sa main sur le bras musclé de –M- et en éclatant d’un rire franc

-C’est ça, fous toi de ma gueule. Non, on n’est plus ensemble. Mais tu me connais, elle m’adore toujours, donc je viens encore. Et crois-le ou pas très chère, je suis super bien accueilli. Je suis même chouchouté…Jalouse va

Meriem releva alors la tête, lui donna une petite claque comme pour exprimer son mécontentement

-Tu sais –M- Ca fait longtemps que tu n’es pas passé, que tu n’as pas appelé mes parents. Tu nous as manqué.

-Depuis que mes parents sont partis au Liban, Tunis est devenue pour moi un point d’escale furtif. Tout le monde est un peu éparpillé partout, tu vois toi, t’es à Paris, et moi je mène mon petit train de vie…Je monte un nouveau projet…mon projet…

Elle leva la tête vers lui. Ils échangèrent un long regard silencieux. Jamais deux personnes n’avaient eu de complicité comme ces deux là. Jamais tendresse, accrochage et amour n’avaient pris autant forme qu’à travers ces deux êtres. Leur silence dura quelques minutes. Meriem se leva la première :

-Bon, moi, je vais en bas danser

-Et moi, je vais au bar

--M-…

-…

-J’aimerai te voir avant que tu ne re-disparaisses

-J’aimerai autant…Je ferai de mon mieux.


Au « king Size » -03h06-

-B- était entrain de nettoyer la table. Elle était fatiguée. Au bilan de sa soirée désastreuse : deux verres cassés, quatre consommations ratées, une erreur au niveau de la note et une tentative d’harcèlement de la part d’un client qui s’est soldée par son expulsion hors des lieux… « Catastrophique ! J’arrête ! Je me débrouillerai pour un boulot de caissière tout simple, tout bête, sans risques…je crècherai chez Cyrine en attendant de payer le loyer. »

-400 euro pour la demoiselle, vous avez assuré pour une première soirée. Et les clients sont satisfaits de votre travail.

Elle regarda la liasse de billets posée sur la table, elle en oublia presque sa dernière résolution. Encore deux semaines de boulot et elle aura payé ses deux mois de retard et deux autres en avance.

-Merci…Je suis retenue si j’ai bien compris ?

L’homme sans expression sourit enfin et dit :

-Oui, vous avez bien compris. Faites vous aider par Matias, si vous vous embrouillez dans les recettes et faites appel à notre cher Mamadou si quelqu’un vous dérange, n’attendez pas que ça vire à l’harcèlement. Quand ils sont souls, ils ne vous lâchent pas. Aaah voilà, notre rayon de soleil-M-, dit-il en se retournant et en regardant en direction du jeune homme. Ou sinon, si vous ne trouvez personne du personnel, vous pouvez compter sur les services de ce bel homme. Il nous égaie souvent nos soirées par sa présence, mais c’est surtout quelqu’un de très serviable.

« Il ne travaille donc pas ici. »

-C’est retenu, je vous remercie pour tout. Je finis quelques petits trucs et je rentre.

-Oh, mais vous pouvez rester encore un peu si vous n’êtes pas trop fatiguée.-M- était déjà attablé tout près du comptoir, avec une petite bouteille de ce qu’elle devina du vin, sur la table. Le rideau tombé cet endroit se transforme en lieu magique. Tentée de voir ce que c’est ?

Il avait le regard de la perte, l’attraction du diable, l’allure de l’amant parfait, la présence de celui qui vous chamboule la journée, le mois, l’année, la vie…Non, elle voudrait rentrer, dormir, reprendre un semblant de vie normale, et se réveiller à une heure décente.

-L’invitation est tentante, mais je pense plutôt rentrer ce soir. Une autre fois peut être.

-Un dernier verre alors ?

-Merci, mais je ne bois pas.

-Reste et je te prépare un virgin mijito moi-même.

Une petite montée de chaleur l’envahit quand il se proposa de lui préparer un cocktail, elle qui était supposée faire la barmaid.

-Je resterai la prochaine fois promis.

Elle ne savait même pas si elle le pensait vraiment ou si elle regrettait déjà d’avoir refusé cette invitation. Toujours est-il que son cœur lui disait que ce monde n’était pas le sien, et qu’en s’y approchant trop, elle risquerait d’y laisser quelques plumes. Et ce n’était vraiment pas le moment de s’aventurer dans des lieux étrangers, de prendre de nouvelles (mauvaises) habitudes.


mardi 27 octobre 2009

when the sun goes down part 2


A l’intérieur du « King size »
Ce soir là au King Size, la soirée était l’une des plus chaudes de l’été 2009. Les gens dansaient dans tous les coins de ce grand loft réaffecté en gigantesque manège à danser. Tous étaient dans une autre dimension, chacun shooté à sa manière. Tout y était : beu, cannabis, marlboro light, extasy, vodka, LSD, red bull etc…chacun sa façon pour tenir le rythme et la cadence jusqu’au petit matin. -B- s’avança vers le comptoir qui était supposé lui servir d’office de travail. « Je dois prendre les choses en main, montrer que je peux me débrouiller toute seule. Voyons voir, par où passent les serveuses ? Ca doit surement être la petite porte battante là dans le coin. »
-Bonsoir, moi c’est –B-, je vous accompagne ce soir pour un essai. Elle cria tant bien que mal, mais le jeune homme semblait ne rien entendre de ce qu’elle disait, ou alors ne voulait rien entendre, puisqu’il lui lança :- deux cosmopolitan pour les deux demoiselles de la table 11. « Euuh oui, cosmopolitan…cosmopolitan…attends que je me souvienne, je l’ai vu hier soir la recette, il y a de la liqueur et de la vodka mais j’arrive pas à me souvenir du jus…oh mon dieu je veux pas être renvoyé avant d’avoir commencé… »

- Vodka, liqueur d’orange, jus de citron et jus de cranberry…et un shot de Tequila pour moi. Il était beau, comme les héros de films, avec toute la description qui accompagne ce genre de personnage dans les livres. Il était brun, grand, élégant, les yeux superbement plein de mystère et malicieusement coquins…perspicace pour avoir suivi la scène et capté la commande, intelligent pour avoir vu dans son regard qu’elle était en détresse et surtout serviable. Cinq minutes plus tard elle posa sur la table les deux cosmo et la téquila.
-Vous travaillez ici ? Il la regarda et lui lança juste après son cul sec : -Non pas vraiment…Et il s’en alla dans la foule tout en saluant quelques personnes au passage. « Ca vous arrive de parler aux autres dans ce trou ? Putain, ce que les gens peuvent être mal élevés quand la musique leur creuse les tympans »
Elle avait toujours appelé le ‘King Size’ le trou, du temps où elle s’y rendait en bande. Le club se trouvait au sous sol et sa notoriété était très accrue par les nuits parisiennes certes folles mais surtout très froides.


-Vous auriez du feu s’il vous plaît ? -B- était de ceux qui taxaient non pas les cigarettes, mais le feu. Elle n’en avait jamais sur elle et même quand elle’ investissait’- comme elle le disait- dans un briquet, il ne lui faullait pas plus d’une journée pour le perdre. Alors elle emprunte, elle sympathise, elle discute avec les passants, héros momentanés de sa journée. L’interdiction du tabac dans les lieux publics la convenait parfaitement. Pas d’odeurs de tabac froid dans les cheveux et les vêtements, mais surtout un lien social très fort, un pont pour les nouvelles connaissances souvent nocturnes. Toutes races et ethnies confondues, ils étaient une dizaine devant le ‘king size’, dans le fumoir, à parler de musique, de soirées, de problèmes, de danse et parfois même de politique. Jusque là, la soirée s’était plutôt bien passée, mais rien n’était encore gagné. Il était 1h24. « J’en ai encore pour 1h36. Je dois tenir le coup. Ca devient de plus en plus chaud par ici. » Les gens qui rentraient encore à cette heure par groupe ne faisaient que confirmer ses craintes.
-Ah tiens, salut toi, qu’est ce que tu fais par ici en parisienne ? Je te croyais à Lyon.
-Salut –B-, c’est une longue histoire. Je te raconterai ça autour d’un café. Dis donc, ca te va bien ce look. T’es super sexy ce soir…quoi, il est là ce soir ?
-Tu parles de qui ?
-De ton nouveau mec, pauv’conne. T’as toujours personne ? Mariem était comme ça, très directe, très franche, très intègre aussi. Les premières années de –B- à Paris furent difficiles et Mariem était le seul salut qui s’était offert à elle pour rattraper sa descente aux enfers. Disons que l’optimisme extravagant de Mimi était toujours au rendez –vous pour redonner le sourire à son entourage. Cette description pouvait sembler banale. L’optimisme pouvait paraître basique et commun à plusieurs personnes…Celui de Meriem était particulier. Il était rattaché à un ‘background’ particulier, à une enfance pas comme les autres et malgré tout une vie d’adulte épanouie…
-Non, toujours personne…Bon ben tu me connais, je n’ai pas changé.
-Toujours amoureuse de lui ? demanda Meriem avec tout le naturel possible.
-Un peu, enfin oui, je l’oublie peu à peu. Mais tu vois, j’ai d’autres problèmes en ce moment. Je suis à sec depuis un petit bout de temps et tu sais que je ne peux pas le dire à mes parents. Je n’ai même plus de quoi payer mon loyer.
-Attends, tu veux que je te prête ? Je ne t’ai pas dis, mais j’ai décroché un CDI très bien rémunéré. -B- fut tentée d’accepter, mais rétorqua :
-Merci ma belle, je pense m’en sortir cette fois aussi. Tiens par la même occasion, viens je te paie un cocktail au bar, c’est moi qui te le prépare. Je te conseille mon mojito, il est divin.
-TON mojito ? Quoi, tu travailles ici, maintenant ? Et depuis quand tu sais faire des mojitos ?
-Depuis ce soir, dit-elle souriante, enfin j’espère être prise.
-Mais c’est super, si t’es prise, le ‘King Size’ deviendra mon QG, ou plutôt notre QG. Je ramènerai les filles avec moi la prochaine fois. Bon vas y ma belle, le temps de la clope est fini. Moi je te rejoindrai au bar, je dois voir un ami avant.